Portrait
13 avril 2018

Portrait de Michel Juvet

par Laëtitia Cadiou


Crédits photos : credit photo @davolosteiner / Davolo Steiner

Un photographe pour qui la vie en rose est forcément en noir et blanc

Un photographe en dehors du carquan

C’est promis on ne parlera pas de ce banquier privé qui officie avec brio depuis plus de 34 ans à la banque Bordier & Cie, qui l’a nommé Associé en 2011. On ne parlera pas de l’analyse des tendances des marchés financiers qu’il prodigue volontiers auprès de médias spécialisés. On ne parlera pas non plus de son altruisme pour soutenir une action auprès de femmes torturées en Afrique de l’Est. Si ! ce sujet-là on va l’aborder puisque c’est de cette humanité bafouée que va naître son premier livre d’images.

La vie en noir et blanc

Michel Juvet est genevois né dans le quartier des Charmilles de deux parents Suisses. Il étudie l’économie et on l’imagine aisément studieux et discret.

La discrétion est sans doute l’une des qualités premières que l’on demande à un banquier privé pour évoluer dans le temps. En photographie aussi l’on doit être discret pour être tapis dans un coin à l’affut du moment à ne pas manquer. C’est prendre son temps, avancer délicatement pour ne pas faire disparaitre l’instant ou son modèle. Toutefois le message transmis peut être puissant et sans retour. L’on citera par plaisir quelques exemples de porteurs de messages par leurs images qui ont su rester gravés dans nos mémoires.

Robert Capa et Henri Cartier-Bresson en créant l’agence de photojournalisme Magnum en 1947,  Raymond Depardon, Hubert Henrotte en 1966 fondent l’agence Gamma. Des photographes qui ont mis leur vie en péril pour témoigner d’évènements majeurs et laisser un patrimoine photographique considérable. Plus récemment les photographes Yann Arthus Bertrand ou encore Sebastiao Salgado s’engagent par le bais de leur travail photographique pour dénoncer les dérives de notre monde de consommation, pour en faire évoluer les mentalités et même pousser nos décideurs politiques à prendre des mesures qui impactent sur notre planète. La photographie c’est sérieux !

London After Brexit – Prix MPA 2016 1ère place dans la catégorie noir blanc

Passion d’exprimer

Il dit avoir toujours eu la passion de la photographie mais pas forcément le temps de s’y consacrer. La photographie argentique dit-il est un procédé minutieux et fragile, s’enfermer dans une chambre noire pendant des heures pour développer ses images, il avoue ne pas y être adepte. C’est à l’arrivée du numérique et son instantanéité qu’il va y reprendre goût. L’envie de capturer l’instant et arriver à le sublimer en y voyant des situations que le passant lambda ne verra pas. C’est sur les réseaux sociaux, souvent  que Michel Juvet partage ses moments en noir et blanc en y accrochant toujours une petite légende humoristique, sans doute pour s’excuser d’avoir du talent et ne pas encore vraiment l’assumer.

Un travail confirmé et récompensé

«Même le ciel ne pleure plus » livre publié aux éditions Slatkine,  qui a obtenu le Prix de la Société Littéraire en 2012, est un recueil de portraits de femmes en Afrique de l’Est. Michel Juvet dénonce les viols et violences perpétrés en toute impunité sur ces femmes sans autre choix que de subir et survivre. Il est important de préciser que la totalité des recettes de ce livre sont redistribuées à une association qui œuvre à soutenir ces femmes pour qu’elles retrouvent leur dignité : l’association Nturengaho au Burundi.

La résurrection de Veremonda

Dans un tout autre registre son deuxième livre : « La résurrection de Veremonda ». A l’origine un pari fou entre un chef d’orchestre Australien, un réalisateur Napolitain, un artiste Turinois, et un costumier Romain de renom : redonner vie après 400 ans à un opéra Vénitien du 17ème siècle. Michel Juvet et la journaliste Allison Zurfluh ont suivi tout le processus de création jusqu’au lever de rideau du spectacle pour apporter un ouvrage magnifique. Recommandé à tous les passionnés de musique, de costumes et d’opéra.

Photo gagnante parmi 4 autres du concours du Musée d’Art et d’Histoire Genève

Paléo Portraits en pied

Il ne pourra pas dire le contraire, c’est sans conteste avec son dernier livre qu’il s’est le plus amusé.  Il a pris « son pied » ou du moins pris ceux des artistes présents au festival du Paléo en 2017. « Paléo Portraits en pied » ce sont des portraits de scène d’artistes et leurs souliers, des clichés surprenants desquels émanent une énergie débordante avec une touche de légèreté. Un lauréat de nombreux prix  qui ne se prend pas au sérieux et ça on adore.