Crédits photos : ©Gabriel Balagué
C’est lors d’un workshop d’initiation à la typographie animé par l’artiste en parallèle de sa dernière exposition Grey Zone à Genève que nous avons pu rencontrer Rylsee. Cet artiste à l’allure juvénile mais au coup de crayon bien affûté, a accepté chaleureusement de répondre à nos questions.
Parcours de Cyril Vouilloz avant de devenir Rylsee?
J’ai passé la moitié de ma vie sur un skate, j’ai fait mon apprentissage dans le plus vieux skateshop de Genève TranZport, ressortant de cette aventure avec un CFC gestion et vente avec en plus une maturité pro commerciale
Un an après mon apprentissage, je visite par hasard les Art Deco à Genève, y vois plein de gens créatifs qui ont l’air bien heureux d’être à l’école, je me dis que je pourrais être l’un d’eux. Je m’inscris, je passe le concours d’entrée, et 4 ans plus tard, je ressors avec un deuxième CFC en poche. Cette fois en graphisme avec également une Maturité pro artistique
Après ces études, je me sentais coincé dans une zone grise, pas assez graphiste pour aller en haute Ecole de graphisme, pas assez arty pour aller peindre avec mon sexe aux beaux-arts… du coup j’ai décidé de partir voyager et d’apprendre des gens qui croiseraient mon chemin. J’ai commencé par Vancouver au Canada pendant une année, puis São Paulo pour finalement arriver à Berlin en 2012, où je vis toujours.
Rylsee > Cyril en verlan est devenu une marque ? Merci les amis ?
Rylsee c’est comme ça que mes potes m’appellent, ça vient effectivement du verlan. C’est un surnom qui est resté depuis.
A quel moment avez-vous compris que la création allait devenir importante ?
J’ai toujours eu ça en moi en fait. Du coup ce n’est pas vraiment quelque chose que j’ai questionné, j’ai juste l’impression que créer de belles choses et rassembler les gens avec, est la raison pour laquelle je suis sur terre.
Vous vivez à Berlin depuis combien de temps ?
Je suis arrivé à Berlin un peu par hasard, en suivant une fille là-bas début 2012. C’est à la même époque que j’ai rencontré l’équipe qui allait devenir ma BERLIN family, le team de URBAN SPREE. Un centre culturel alternatif au cœur de la ville, qui mêle musique et art visuel.
Aujourd’hui je vis toujours à Berlin avec ma femme et ma fille, et mon frère Yann qui nous a rejoint il y a presque deux ans.
Vous surfez entre la typographie, le graffiti, le design, comment nommer votre art ?
C’est toujours une question difficile, j’aime dire que « je joue avec les lettres »
Vous avez commencé par l’une de ces catégories artistiques ?
J’ai toujours été passionné d’images, et on me dit souvent que je possède une imagination très fructueuse. J’ai donc toujours essayé d’exprimer celle-ci par tous les moyens possibles. 🙂
Vous n’allez pas aimer cette question…Une étiquette artistique?
Il semble que les gens, autant que moi, trouvent difficile de mettre une seule étiquette sur mon travail. Je n’ai rien contre les étiquettes à vrai dire, ça serait pratique pour expliquer mon travail en un mot, mais je n’y suis encore pas parvenu. Une suggestion ?
Grey Zone est votre première exposition solo ?
Non loin de là, j’ai présenté mon travail dans de beaucoup de pays au cours de ces 10 dernières années, cela dit je n’étais pas venu présenter une expo solo dans ma ville natale depuis 2013.
Pourquoi ce nom GREY ZONE ?
GREY ZONE décrit la sensation que j’ai ressentie pendant très longtemps face à ma créativité. En effet je me sentais coincé entre toutes ces choses qui me font vibrer, le graffiti, la typographie, le skate, l’illustration… « coincé » dans une sorte de zone grise, une zone à laquelle il est difficile d’accrocher une étiquette.
Après des années de doute et de travail acharné, cette zone grise est dorénavant devenue ma force, ma différence, ma personnalité.
Genève est-elle la première ville pour cette exposition ?
La première et unique !
J’ai voulu créer quelque chose spécialement pour ma ville, pour essayer d’inspirer les gens et montrer que malgré l’attention internationale que mon travail reçoit, je n’oublie pas d’où je viens.
Quelle est votre relation avec la Suisse avec Genève ?
J’aime Genève et la Suisse. Le fait que je vive dans d’autres pays depuis 2010 est un peu un enchaînement de circonstances. Cela dit, je reviens plusieurs fois par année par ici car j’y ai ma famille, mes homies, mes racines.
Première exposition où vous avez invité la couleur, votre partenariat avec Caran d’Ache a-t-il été un déclencheur?
Absolument, après notre première collaboration, il y a un an environ et la visite des usines des productions de couleurs, j’ai eu envie de sortir de ma zone de confort et me jeter à l’eau.
Une autre source d’inspiration que les couleurs est ma femme, l’artiste Rommy González (@RommyGon) qui excelle dans l’utilisation de toutes les gammes de couleurs. Je pense que l’un dans l’autre, il m’a paru naturel d’essayer de colorer mes créations. Cela dit, je me sens quand même plus à l’aise en noir blanc.
Parlez-nous de votre collaboration avec Caran d’Ache Comment a-t-elle commencé?
Notre première collaboration était une campagne pour leur nouvelle gamme « claim your style » de leur fameux stylo 849. J’avais réalisé une série d’illustrations en trompe l’œil qui mettait en scène ce stylo.
C’était une super expérience, autant niveau travail que celui humain, nous sommes depuis devenu amis et de futures collaborations sont plus que probables. 😉
Le mythique stylo 849 Caran d’Ache par Rylsee
Lorsque Caran d’Ache m’a informé qu’ils étaient partant pour soutenir ma nouvelle exposition et mes workshops, l’idée de créer une série spéciale du stylo emblématique 849 nous est venue à l’esprit. Une série exclusive et limitée à 100 pièces du 849 a donc été créé spécialement pour l’expo Grey Zone. Le design se veut simple, épuré mais avec plusieurs détails amusants cachés dedans.
Pour ce design, je me suis inspiré des « bruitages » que je fais souvent lorsque je dessine. Je me suis enregistré en train de dire: CARAN D’ACHE – RYLSEE – GENEVA. Puis j’ai repris le visuel de la bande sonore de ma voix et l’ai traduite en visuel. J’y ai également incorporé des détails liés à Genève comme un jet d’eau et un signe ainsi que des petits « glitch » Comme j’aime le faire dans mon travail graphique. Au final, un magnifique stylo noir mat avec un design blanc satiné. Mon détail favori est que mon stylo est muni d’encre noire.
Last but not least, nous avons décidé de reverser 100% des ventes de ce stylo à la fondation : PAINT A SMILE dont Caran d’Ache est partenaire. C’est une fondation qui invite des artistes à décorer des hôpitaux pour enfants afin de rendre ces endroits plus agréables pour les jeunes patients.
D’autres collaborations ?
Oui beaucoup, je travaille régulièrement avec de grandes marques pour différents projets artistiques. Pour en nommer certaines, NIKE, HP, IKEA, OPINEL, MOLESKINE…
À mi-chemin entre art et design, mon travail s’applique aussi bien à des fresques murales géantes que des designs de produits. J’aime le défi qu’amènent des collaborations avec des marques et ces projets m’emmènent parfois sur des pistes que je n’aurais jamais prises autrement.
Vous avez lancé votre marque de mode et design, votre approche créative est-elle donc guidée par cela?
J’ai grandi dans la street culture, entre le skate, le graffiti et le hip-hop, la mode a toujours eu un rôle important dans ma vie. Après avoir travaillé à plusieurs reprises avec des marques, j’ai eu envie de pouvoir créer un projet qui représenterait ma vision de cette culture et de la partager avec les gens qui se reconnaisse dans ce que je fais.
Mon frère et moi avons créé le label SNEEER il y a environ trois ans et l’effet boule de neige ne s’arrête pas. Je pense que les gens aiment SNEEER car cette marque reflète une vision légèrement décalée d’une culture/mode que l’on aime. L’humour est définitivement un de nos moteurs avec des slogans comme BEST COOL ou TOO SHY TO RAP!, les gens peuvent afficher leur amour léger pour cette street culture parfois un poil trop sérieuse. 🙂
Votre travail artistique est-il ciblé et dans la tendance? Ou au contraire un suivi logique de votre recherche artistique ?
Cela peut paraître contradictoire mais je pense créer hors des tendances sans pour autant les ignorer.
J’aime la mode, le graphisme, la musique etc et la culture qui émane de ces disciplines. Mais mon inspiration vient de la vraie vie, de mon quotidien, des gens, de la rue. Mes œuvres sont généralement le fruit d’une réflexion interne et personnelle du monde qui m’entoure saupoudrée d’un brin d’humour. 🙂
Vous êtes entouré par toute votre famille, votre frère est votre agent et on a croisé votre maman à l’exposition, un équilibre nécessaire?
C’est magnifique d’avoir la chance de réaliser ces beaux projets avec ma famille et les gens que j’aime. Je pense que l’esprit d’équipe me/nous rend plus fort et nos projets prennent une plus grande dimension, c’est une expérience artistique et sociale à la fois que l’on vit ensemble. De beaux moments que je suis heureux de pouvoir partager avec toutes ces personnes. 🙂
Des projets prochains ?
Redécorer la chambre de ma fille!
Votre artiste, architecte, designer préféré ?
Mère nature
Une source d’inspiration ?
La vie quotidienne
Avec qui rêveriez-vous de collaborer ?
Peut-être avec la ville de Genève pour un projet de sculpture métallique géante (et skateable) en lieu public. Ce serait si cool! Je suis prêt!
Que pouvons-nous vous souhaiter ?
Santé 🙂
Merci à Rylsee pour sa dédicace !