JoaillerieBijoux
12 mai 2020

De Beers, un diamant est éternel

par Eugénie Rousak


Marilyn Monroe se fascinait pour Tiffany’s, Cartier, Blackstar ou encore Ghoram, seulement c’est grâce à une autre Maison que les diamants sont devenus les incontestables girl’s best friend. Moins connu du grand public, mais vertigineusement notoire dans le milieu, De Beers a tracé l’histoire-même de l’industrie diamantaire au fil de son développement ! Maitrisant l’exploitation minière, définissant les standards de qualité et guidant ingénieusement la demande, le groupe centenaire a réalisé un véritable coup d’éclat !

Alors que leur formation dans le manteau terrestre date de plusieurs milliards d’années, les diamants fascinent, encore et toujours. Aussi scintillants que résistants, ces petits grains de carbone attirent le regard pour délicatement dévoiler la fortune de leur propriétaire. Si avant le XIXe siècle seuls les monarques pouvaient en posséder, la découverte de nouveaux gisements en Afrique du Sud dans les années 1850 fait s’abattre une pluie d’adamas sur le monde. Une véritable inondation de l’offre qui fait oublier la rareté de cette pierre ! La loi du marché oblige, la valeur des gemmes chute. Le prix d’un diamant est équivalent à celui de la turquoise ou de la topaze ! L’histoire aurait pu s’arrêter à ce moment-là. La pierre précieuse tant convoitée aurait pu perdre tout son éclat et devenir un lointain attribut de prospérité. Mais elle retrouve rapidement son piédestal, grâce à un certain Cecil Rhodes et son ingénieuse stratégie. Louant les pompes à eau aux mineurs, cet homme d’affaire est progressivement pris par la fièvre diamantaire. Alors que l’industrie est en plein effondrement, ce visionnaire croit à la valeur intrinsèque de ces débris brillants et rachète massivement les terres. Mais l’histoire ne connaîtra pas d’enseigne Rhodes.

©DeBeers

Sous le nom de De Beers

Dans le cadre de ses prospections, Cecil Rhodes remarque le champ de Johannes et Diederik De Beer, près de la rivière Orange. Si les deux frères ne veulent pas participer à la flamboyante ruée vers les gemmes et vendent leur terrain à l’homme d’affaire britannique, c’est paradoxalement leur nom qui va marquer l’Histoire diamantaire. D’abord sous la marque De Beers Mining Company, ensuite De Beers Consolidated Mines et finalement Diamond Trading Company, Cecil Rhodes continue son ascension à travers les constellations scintillantes. Il rachète toujours plus de mines et de concurrents. Son objectif ? Monopoliser le secteur ! Et c’est une success story ! À la fin du XIXe siècle, 90% de la production et de la distribution autour du globe est entre les mains de ce britannique, qui avec justesse et clairvoyance maitrise désormais l’offre sur le marché. Il décide alors de créer une pénurie, qui est certes artificielle, mais permet aux diamants de regagner leurs lettres de noblesse. Avec les prix assurés, le secteur peut également se stabiliser, ce qui pousse au développement des différents métiers de l’industrie, comme polisseur, par exemple. Après le décès de Cecil Rhodes, l’éblouissant empire passe entre les mains de son concurrent, Ernest Oppenheimer, propriétaire de l’Anglo American Corporation. C’est sous sa direction, que De Beers devient la boucle fondamentale de la chaine diamantaire, sans laquelle aucune transaction ne peut être conclue. L’influence de la Maison est sans égal ! Consolidant plus de cinquante ans de connaissance dans les gemmes, De Beers pousse l’innovation jusqu’à son apogée en concrétisant même une grille de standards pour le monde de la joaillerie en 1939 : Carat, Cut (Taille), Clarity (Pureté) et Colour (Couleur). Et oui, les fameux quatre C qui permettent d’évaluer la qualité d’un diamant, sont également signés De Beers !

Une histoire d’éternité

Comme d’autres secteurs, la joaillerie est impactée par la Grande Dépression. Ne se laissant pas abattre, le fils d’Ernest Oppenheimer, Henry, décide alors de faire d’une pierre, précieuse évidemment, deux coups. S’alliant avec l’agence newyorkaise de publicité N.W. Ayer, De Beers lance une campagne publicitaire très audacieuse dans les années 50. Son impact sera colossal aussi bien pour le groupe qui verra ses ventes se multiplier par 100, que pour l’avenir du diamant dans sa globalité. L’intrigue est lancée ! Quelle donc cette formule exceptionnelle ? Le slogan qui deviendra la devise de la compagnie : « A diamond is forever » (Un diamant est éternel). Utilisant ces quatre mots, la Maison lie définitivement l’âme de la pierre précieuse à la représentation de l’amour. Aussi solide et pure que les sentiments les plus profonds, le diamant symbolise la relation éternelle, qui fait briller la vie de mille feux. C’est ainsi que le solitaire s’installe fièrement au centre de la bague de fiançailles ! Plus il est démesuré, plus l’amour est sincère, bien entendu. Qui aurait cru qu’une campagne marketing allait autant formater les demandes en mariage…

©DeBeers

Qui a dit le synthétique ?

Alors que les conflits autour de la provenance et des moyens d’extraction éclatent dans l’industrie, de nouvelles normes éthiques se mettent en place pour éviter l’exploitation des pierres de sang. Suivant cette tendance, De Beers revoit également sa manière de travailler, ne proposant alors que des gemmes de fournisseurs qui respectent le processus de Kimberley. Mais si cette décision était assez prévisible, ce qui va suivre en 2018 va renverser l’industrie. Après près de 130 ans à ne jurer que par les précieux petits cailloux extraits du sol, la Maison a décidé d’élargir sa gamme en proposant des pierres synthétiques. Une nouvelle étape pour cette entreprise avant-gardiste !

Le joaillier De Beers

Avec LVMH, la Maison s’est tournée vers une nouvelle ère au début des années 2000. Dorénavant, c’est également sous le nom de De Beers Diamond Jewellers, que la Maison mène une révolution créative et audacieuse dans la joaillerie. Bien plus qu’un artisan, elle fait parler les diamants dans des compositions uniques. Que cela soit à travers l’explosion des couleurs de la gamme dévouée à la nature elle-même, la puissance des Dieux des mythes célestes ou encore la sérénité du délicat lotus, chaque collection ouvre un nouveau chapitre de l’élégance et symbolique. Il est inimaginable d’explorer le monde de De Beers sans évoquer la chimérique collection Talisman, l’incarnation même de la philosophie de la Maison. Sur un coussin doré se retrouve le passé et la modernité. Pour la première fois, la pierre brute et sa version travaillée se rencontrent pour laisser la légende s’entremêler à l’interprétation contemporaine. Toute une aventure !

©DeBeers

Si De Beers a perdu son monopole du diamant, la Maison plus que centenaire a su évoluer, parfois en pliant le monde à ses standards, parfois en s’adaptant aux tendances nouvelles. Qu’elle soit productrice, commerçante ou créatrice, la marque à tracé l’histoire du diamant pour aujourd’hui viser l’éternité.